Militante et femme emblématique
Dans la photo ci-dessus Harbeen Arora, présidente générale du Forum Économique des Femmes (‘Women Economic Forum’), remet à Angela Babb le prix de ‘femme emblématique contribuant à un monde meilleur pour tous’.
Angela Babb, a grandi dans les quartiers difficiles de l’est londonien, elle ne s’est jamais considérée comme quelqu’un « d’emblématique ». Elle n’a jamais été non plus obsédée par l’idée que la pauvreté serait un obstacle dans sa vie. « La pauvreté, c’est un mot terrible qui fait penser à l’Afrique », a-t-elle dit lors de la Journée internationale des droits des femmes, au Forum Économique des Femmes, aux Pays-Bas, alors qu’un jury international lui remettait le prix de ‘femme emblématique contribuant à un monde meilleur pour tous’.
Depuis qu’Angela est née, on n’a jamais parlé en bien de son quartier dans les médias. Quand on s’y est intéressé, c’était à cause de problèmes. « Notre actualité, cela a toujours été celle de l’ado poignardé, des armes à feu, des fusillades », a-t-elle expliqué en recevant son prix.
Angela n’a certainement jamais pensé à se plaindre ou à s’exprimer devant le Parlement Britannique. C’est pourtant là où elle s’est retrouvée un jour. « Pour avoir voix au chapitre, a-t-elle dit, il faut avoir l’occasion de rencontrer un jour des gens qui vous respectent. »
Angela a trouvé des gens pour la respecter le jour où elle s’est engagée au sein d’ATD Quart Monde. En tant que co-auteure de « Les Rôles que nous jouons : reconnaître la contribution des plus pauvres », Angela est devenue l’ambassadrice de sa communauté et a expliqué les défis que pose la pauvreté. Ne pas avoir d’argent, c’est dur, bien sûr, mais parfois, ce sont les humiliations le pire, a-t-elle expliqué :
- « La pauvreté, c’est quand les autres vous voient comme un parasite. Avoir recours à l’aide alimentaire, ça peut être humiliant, mais vous n’avez pas le choix, si c’est le seul moyen de subvenir aux besoins de votre famille. Pourquoi est-ce qu’on stigmatise autant les gens ? »
Angela a reçu le prix de ‘femme emblématique contribuant à un monde meilleur pour tous’ en raison de son travail avec ATD Quart Monde, ces dix dernières années, et en particulier pour avoir donné une voix à celles et ceux qui, comme elle, font l’expérience de la pauvreté. En 2017, elle s’est exprimée lors du colloque national du Forum Économique des Femmes (WEF) sur les droits humains et la pauvreté. Cette année, en parlant devant l’assemblée européenne du WEF, à La Haye, Angela a évoqué les obstacles qui se dressent en travers de la participation politique des plus pauvres :
- « L’engagement politique, pour des femmes comme moi, ça peut être difficile, à cause de la pauvreté. On pousse les plus pauvres à se sentir mal dans leur peau et puis ils sont tout le temps accaparés par des problèmes. La pauvreté, c’est qu’on est stigmatisé. Quand on vous humilie, ça devient plus difficile de s’exprimer en public et de participer à la vie politique. »
Harbeen Arore, la présidente générale du Forum Économique des Femmes, qui a remis à Angela le prix de la ‘contribution emblématique à un monde meilleur pour tous’, a souligné, à propos de son discours, que : « Ces mots qui mettent les choses en perspective attirent notre attention sur les réalités invisibles de notre société. Il est essentiel de fêter nos victoires, de nous encourager mutuellement, de nous inspirer les unes les autres, sans quoi, on ne pourrait pas aller de l’avant. Mais il faut aussi regarder ce qui nous blesse, ce qui nous tire vers le fond. […] Merci de ce que vous faites avec ATD Quart Monde pour toutes les personnes qui vivent dans la pauvreté et de travailler pour que le monde soit meilleur et plus accueillant, non pour quelques-uns seulement, mais bien pour tous. »
Près de 200 participants de plus de trente pays se sont rassemblés pour le congrès européen de 2018. Au milieu des dizaines de débats sur des thèmes allant de la montée en capacité au développement durable, une oratrice en particulier a impressionné Angela : une jeune femme de 25 ans du nom de Mutetelenu Kalama. Dans sa Zambie natale, a expliqué Mutetelenu, quand elle avait 16 ans, beaucoup de ses amies ont dû interrompre leur scolarité à cause du SIDA ou d’une grossesse précoce. Quand l’UNICEF a proposé de former des jeunes gens pour devenir des défenseurs du développement durable dans le contexte du changement climatique, elle a « sauté le pas » et a rejoint le programme.
En apprenant à prendre la parole en public, Mutetelenu a eu envie d’en faire plus, même si on lui disait qu’à « trop parler », elle pourrait bien avoir du mal à trouver un mari. Mais Mutetelenu a persévéré et co-fondé la Fondation pour les Acteurs du Changement (‘Agents of Change Foundation’), une organisation de jeunes destinée à transmettre la formation qu’elle a elle-même reçue. En 2010, elle est devenue ambassadrice de l’UNICEF pour la lutte contre le changement climatique et contre le SIDA. Elle s’est aussi portée volontaire auprès du planning familial et d’ActionAid. « Mon but, a-t-elle dit, c’est que les jeunes filles puissent se voir différemment et s’exprimer au grand jour. »
Benjamin Western, un autre des participants au colloque, a expliqué combien les valeurs du souci de l’autre portées par son grand-père lui ont donné l’inspiration pour le volontariat. Cependant, il a constaté que certains projets pour la responsabilité sociétale des grandes entreprises n’ont en réalité pas d’impact positif sur les ONG qu’ils se proposent d’aider. Alors il a fondé ‘IndiGO Volunteers’, pour aider les volontaires à s’adresser aux personnes les plus vulnérables. Il est également en train de développer une plateforme du nom de Gaggle, pour encourager les gens à consacrer plus de temps au volontariat et à améliorer les projets pour la responsabilité sociétale du secteur privé.
Benjamin a été vivement intéressé par la découverte d’ATD Quart Monde et par le projet « les rôles que nous jouons ». Il projette de le présenter aux entreprises comme une manière pour leurs employés d’apprendre des personnes mêmes qui ont une expérience directe de la pauvreté, les défis qu’elles affrontent et, dès lors, d’avoir accès à une perspective si souvent déformée par le discours habituel des médias sur la pauvreté.
Durant la rencontre, Angela et Diana Skelton, une autre membre d’ATD, ont animé un atelier intitulé « Explorer et résoudre différentes inégalités ». Ci-dessous les textes (en anglais) sur lesquels elles se sont appuyées pour ouvrir l’atelier :