Quand l’école devient l’affaire de tous
Mirantao est un petit village isolé dans l’Etat du Minas Gerais au sud-est du Brésil. Avec moins de 1000 habitants et peu d’opportunités économiques, beaucoup de jeunes songent à s’en aller. Parmi eux, il y a Mauricio, parti à la ville pour une vie meilleure. Il y a aussi Marcia, une grand-mère qui élève son petit-fils. De l’école elle ne garde que le souvenir des châtiments. Comme eux, de nombreux enfants sont privés d’un parcours scolaire réussi et les savoirs de ces familles rurales restent à la porte de l’école. Mais la vie de l’école et de la communauté sont en train de changer.
La participation à la vie communautaire et à celle de l’école sont au cœur de la mission de deux volontaires permanents d’ATD Quart Monde qui habitent Mirantao avec leurs deux garçons depuis 2012. Avec la communauté rurale, l’administration, les institutrices, les parents et les élèves, ils ont cherché à construire ensemble une école ouverte aux savoirs traditionnels, en créant des dialogues entre tous ces acteurs.
Un projet né d’une conviction forte qu’exprime le couple de volontaires : «L’école représente souvent pour les parents l’espoir que leurs enfants aient une vie meilleure que la leur. Mais ils pensent aussi que ce qu’ils ont appris en dehors de l’école n’a pas de valeur, que cela ne sert à rien. Leurs savoirs n’y sont pas reconnus. Pourtant, l’avenir d’une communauté passe par reconnaître la valeur de sa culture et de ses traditions, en créant des espaces où ceux qui ne sont pas allés à l’école formelle mais à celle de la vie puissent partager ce qu’ils savent et se sentir fiers de ce qu’ils sont. Les parents souhaitent au fond que l’école soit une chance pour tous les enfants, que chacun puisse décider librement de son avenir, de devenir universitaire ou agriculteur… D’où l’importance de créer une plus grande proximité entre l’école et les parents, entre l’école et la communauté, et de favoriser une meilleure participation des enfants au sein de l’école.»
Les enseignants ont donc commencé par expérimenter « l ‘école hors les murs », en allant faire classe dans le village une fois par mois, puis toutes les semaines. L’initiative fut prise durant une réunion avec les parents qui décidèrent de s’impliquer dans ce projet. A présent chaque vendredi est dédié à apprendre « avec la vie ». C’est ainsi que Marcia a pu partager son talent, elle qui a la main verte. Pendant un mois, elle a aidé à la création d’un potager à l’école du village. Les élèves apprennent à y cultiver des légumes grâce à Marcia qui leur a transmis toute la richesse de son savoir.
José Pacheco, célèbre pédagogue portugais vivant au Brésil, a développé une pensée très intéressante sur l’école et la communauté. Invité par Mariana et Eduardo, il est venu à Mirantao, a parlé avec les institutrices, les parents, les élèves, pour qu’ensemble ils puissent repenser le projet pédagogique de l’école du village.
Une fois la communauté impliquée, de nouvelles initiatives surgissent. Mauricio, parti du village pour aller étudier et travailler en quête d’une vie meilleure, a décidé de revenir et de transmettre aux enfants son amour du lieu et surtout de la musique. Grâce à lui les enfants apprennent à jouer d’un instrument et pratiquent la musique ensemble. Revenir au village, c’est aussi renouer avec un savoir transmis par la famille : c’est le père de Mauricio qui lui a appris la musique.
Grâce à la concertation autour d’un projet éducatif inclusif qui mobilise l’ensemble de la communauté, un chemin d’avenir pour les enfants, les jeunes et leurs familles s’est ouvert à Mirantao.