L’éducation pour tous les enfants en Afrique : l’heure est venue
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Les enfants prennent la parole
« L’accompagnement des enfants est une priorité pour moi. Je suis en faveur de l’éducation. Ne renonce pas à fréquenter l’école. »
Ce message a été exprimé par les enfants au Sénégal lors de la Journée Mondiale de l’Enfant Africain, célébrée le samedi 22 juin 2024 au complexe Léopold Sédar Senghor de Pikine. ATD Quart Monde Sénégal a rassemblé des enfants de Sam-Sam, Grand Yoff et Baraka pour aborder la question de l’éducation et défendre les droits des enfants. Plusieurs acteurs impliqués dans la protection des jeunes ont été invités, dont un éducateur spécialisé titulaire d’un diplôme en travail social, le Point Focal de la Société Civile et du Comité de Suivi pour la Protection de l’Enfant dans l’Arrondissement de Thiaroye, ainsi qu’un professeur de mathématiques. Une adolescente de Grand Yoff a également pris la parole au nom des enfants.
La cérémonie a commencé par des témoignages émouvants, mettant en lumière l’importance de l’éducation et démontrant à quel point il est essentiel pour un enfant de rester à l’école, même face aux difficultés. Un des jeunes a expliqué que son camarade avait quitté l’école pour vendre des sachets d’eau et aider sa mère. En voyant qu’il pouvait gagner de l’argent, il a décidé d’abandonner ses études.
Ces témoignages ont rappelés aux enfants que l’école reste la voie la plus sûre pour leur avenir.
Pour sensibiliser davantage à cette cause, interpeller les autorités et réclamer le respect de leur droit à l’éducation, les enfants ont exposé leurs créations artistiques. Trois tableaux portaient des messages forts :
- « Oui à l’accompagnement des enfants »
- « Oui à l’éducation des enfants »
- « Oui à ne pas quitter l’école »
Les intervenants ont salué le travail remarquable d’ATD dans l’accompagnement des enfants. Ils ont également insisté sur le fait que l’éducation est un levier fondamental pour le développement social. D’ailleurs, les indicateurs montrent que le Sénégal a réalisé des progrès considérables dans ce domaine.
« Il est temps de confirmer notre engagement à garantir à tous les enfants un accès à une éducation de qualité, inclusive et équitable. » a conclu l’un des intervenants.
Un message porté de manière créative
Au Burkina Faso, la Journée Mondiale de l’Enfant Africain a été organisé un comité indépendant, composé d’un membre de l’équipe d’ATD Quart Monde et d’animateurs ainsi qu’animatrices d’enfants (de groupes Tapori et d’enfants en situation de rue), pour s’assurer que l’événement soit une réussite.
Afin de porter la voix des enfants concernant l’accès au droit à l’éducation, le Mouvement les a accompagnés pour qu’ils puissent s’exprimer librement durant la célébration. À travers des pièces de théâtre, des témoignages, des prestations musicales, des poèmes et des animations culturelles comme des percussions au djembé, les enfants ont partagé leurs revendications et propositions pour garantir un accès à une éducation de qualité.
Un enfant Tapori a déclaré :
« Que je sois une fille, que je sois un garçon, j’ai le droit d’aller à l’école… Une école pour tous les enfants et leur avenir. »
Son ami a ajouté :
« Dans notre quartier, il y a des enfants qui n’ont pas eu la chance d’aller à l’école. Ce n’est pas normal. L’analphabétisme est un mal qu’il faut combattre à la racine. »
Un enfant en situation de rue a ensuite chanté :
« À cause de la situation sécuritaire, nous sommes retrouvés dans la rue, nos frères et sœurs n’ont plus accès à leurs écoles. »
Le directeur de la famille et de l’enfance a, pour sa part, souligné la nécessité de prendre en charge les enfants de la rue. Et de son côté, le représentant du ministère de l’Action sociale a encouragé la scolarisation de tous les enfants pour préparer leur avenir.
Enfin, le représentant de la Commission nationale des droits humains a insisté sur l’importance d’intégrer les défis liés à l’éducation dans les futurs plans d’action.
Un monde meilleur grâce à une éducation équitable
En Côte d’Ivoire, la célébration a eu lieu dans le quartier Gbintou, en présence d’environ 200 enfants, de leurs parents, des représentants des chefs de quartiers, ainsi que d’invités venant de diverses structures. Avant l’événement, des enseignants, des religieux et des coutumiers s’étaient déjà rencontrés pour discuter de l’évolution de l’éducation en Côte d’Ivoire.
Lors de la célébration, les enfants ont exprimé leurs rêves et leurs espoirs de vivre dans un monde meilleur grâce à une éducation équitable. Ils ont souligné que l’éducation ne se limite pas à l’école, mais s’étend également à la maison, à l’église ou à la mosquée. Leur réflexion a motivé les organisateurs à approfondir leur compréhension de l’éducation.
Des discussions avec des directeurs d’écoles et des représentants locaux ont révélé que, malgré la gratuité de l’éducation de base instaurée en 2020, des obstacles demeurent. Parmi eux, la perte des parents, des difficultés administratives liées à l’obtention des actes de naissance, et le travail des enfants qui empêche certains de fréquenter l’école.
Les jeunes ont réfléchi au thème de l’éducation pour tous et ont souligné l’importance des traditions éducatives. Ils ont donné l’exemple de la culture AKAN, où des pratiques culturelles peuvent influencer l’accès à l’éducation et les droits des enfants.
Les militants ont discuté des principaux obstacles à l’accès à l’éducation, notamment la pauvreté, la négligence et les préjugés sociaux. Ils ont également proposé des pistes pour surmonter ces difficultés.
Tous ont exprimés leur désir d’accéder à une éducation de qualité devant leurs parents et invités. Monsieur Thierry, un allié du Mouvement à Bouaké, a conseillé aux enfants d’éviter les actions illégales pour ne pas finir en prison. Un parent a également tenu à remercier le Mouvement pour ses efforts dans le quartier Gbintou, ainsi que pour l’organisation de cette journée au sein de leur communauté.
Des avancées encourageantes pour relever les défis de demain
Dans la salle de la bibliothèque de la Paroisse Notre-Dame d’Afrique en République Démocratique du Congo, les activités ont débuté dès le matin avec un mot de bienvenue de la part de François Mwanzire. Joël Kiramba a enchaîné pour rappeler l’importance de l’accès à l’école pour tous les enfants en République Démocratique du Congo. Il a mis en avant plusieurs points essentiels :
- Le taux de scolarisation en primaire est passé de 59 % en 1999 à 79 % en 2021, selon l’UNESCO, témoignant de progrès significatifs dans l’accès à l’éducation.
- L’éducation universelle en Afrique est cruciale pour le développement et l’inclusion sociale.
- L’éducation est un droit fondamental de chaque enfant.
- En période d’urgence, l’éducation peut littéralement sauver des vies.
- Elle joue aussi un rôle clé dans la formation morale des enfants.
- Avec l’évolution du monde, la technologie devient un acteur incontournable dans l’apprentissage.
Depuis 2019, la RDC a instauré la gratuité de l’enseignement primaire sur l’ensemble du territoire, conformément à l’article 43, alinéa 4, de la Constitution. C’est à l’État de prendre en charge les frais de scolarité, a expliqué Christine Nilere, offrant la gratuité de l’éducation dans les écoles publiques.
Sœur Justine Bavurhe, directrice d’école, a rappelé que les éducateurs ont la responsabilité de fournir à tous les enfants une éducation de qualité pour qu’ils puissent relever les défis de demain. Toutefois, elle a également souligné les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre de la gratuité de l’éducation en République Démocratique du Congo, en raison du manque de matériel didactique, de la pénurie de salles de classe, liée au nombre croissant d’élèves inscrits et de la perte de motivation chez certains élèves, qui perçoivent l’école comme un droit acquis et sans coût.
Permettre aux enfants de rêver pour l’avenir
En Tanzanie, l’événement a eu lieu au Kitulo social hall – Nefaland hôtel Morogoro Road Dar es Salaam. 300 personnes y ont participé dont des fonctionnaires, des parents, des acteurs d’ONG et des enfants issus de communautés vulnérables.
L’événement, entièrement organisé par les enfants, a mis l’accent sur leur participation active. Ils ont animé les activités et dirigé les discussions de groupe, créant un espace où ils pouvaient s’exprimer librement. Les enfants ont ainsi partagé leurs défis, leurs espoirs, ainsi que leurs attentes vis-à-vis de leurs parents, de la communauté, des ONG et du gouvernement. Durant cette journée, ils ont également eu l’occasion de consigner par écrit leurs préoccupations et leurs rêves pour l’avenir.
Par la suite, des messages importants ont été adressés aux enfants, aux représentants du gouvernement, aux parents et aux autres invités présents, portant sur les droits fondamentaux des enfants. Tous se sont engagés à prendre des initiatives pour garantir que ces droits soient respectés et offerts à chaque enfant.
Suite à la commémoration, les ONG et les organisations de la société civile (OSC) ont proposé l’ouverture d’un bureau de défense des droits des enfants afin de sensibiliser davantage la communauté et de demander une intervention plus ferme du gouvernement. Parmi les recommandations, on retrouve :
- Promouvoir une éducation inclusive pour tous les enfants, en tenant compte de leurs besoins spécifiques.
- Donner la priorité aux enfants vulnérables pour garantir leur accès à l’éducation et revendiquer une éducation de qualité pour tous.
- Encourager les ONG à collaborer avec le gouvernement pour sensibiliser la population à l’importance de l’éducation inclusive.
En solidarité avec ceux qui ont dû abandonner l’école
La célébration de la journée en Centrafrique a été un moment de grande importance pour aborder les défis auxquels les enfants sont confrontés en matière d’éducation. Cette journée a rassemblé plusieurs participants, y compris des enfants, des autorités locales, des représentants de l’UNESCO et du Ministère de l’éducation nationale, ainsi que des enseignants et des directeurs d’école.
Les enfants ont profité de cette occasion pour aborder des thèmes comme l’exclusion des enfants vivant dans la grande pauvreté, l’accès universel à l’éducation, les défis éducatifs en Centrafrique, le respect des autorités par les enfants, la lutte contre la maltraitance en milieu scolaire, l’importance de l’acte de naissance pour l’inscription à l’école, et la prévention des violences en milieu scolaire.
Les enfants ont exprimé leur frustration face aux inégalités et aux pratiques inappropriées qui affectent leur éducation, soulignant qu’elle devrait commencer à la maison et se poursuivre à l’école de manière équitable et inclusive. Ils ont dénoncé un système éducatif qui, selon eux, favorise la corruption et exclut les enfants en situation de pauvreté, et ont plaidé pour une éducation de qualité accessible à tous, sans discrimination.
Un point crucial soulevé par les enfants est la nécessité de soutenir et d’encadrer les enseignants qualifiés, tout en critiquant l’utilisation de « maîtres parents » non formés dans le système éducatif. Ils ont également encouragé les enfants vivant en situation de rue à persévérer dans leurs études pour changer la perception de ceux qui les marginalisent.
Enfin, les enfants ont rendu hommage à leurs pairs qui ont été contraints d’abandonner l’école en raison de conflits armés, de guerres, de déplacements forcés ou de catastrophes naturelles. Ils ont également fait appel aux autorités pour améliorer les infrastructures scolaires, en évoquant des conditions d’apprentissage précaires, telles que des classes en plein air construites avec des matériaux rudimentaires comme des feuilles de palmier.
Un appel à l’action
Dans tous ces contextes, la célébration de la Journée Mondiale de l’Enfant Africain a été un moment crucial pour rappeler aux gouvernements et aux communautés l’importance vitale de garantir à tous les enfants un accès équitable à une éducation de qualité. Les événements ont également mis en avant l’engagement des enfants à défendre leurs droits et à contribuer positivement à leur société, tout en appelant à des actions concrètes pour surmonter les obstacles persistants.