Formateurs pour les autres : ils bâtissent la paix en Centrafrique
Depuis le début du conflit en Centrafrique, des jeunes adultes engagés dans leur quartier ne cessent de chercher les chemins de la paix en créant des moments de rencontre et de dialogue avec des acteurs de leur quartier, dans les écoles, dans les communautés. Ils se sont formés et deviennent à leur tour des « formateurs à l’éducation à la paix ». Toutes ces rencontres renforcent l’engagement citoyen de ces personnes, déjà engagées avec ATD Quart Monde, et participent à la création de relations différentes dans la communauté. Un véritable exercice de démocratie participative.
Une première formation « Vers la citoyenneté par le chemin de la paix » en juin 2014 avec l’association rwandaise Umuseke a permis de réfléchir ensemble aux mécanismes qui ont conduit au conflit (mise en lumière des perceptions, généralisations, préjugés, rumeurs) et d’entrevoir des solutions : se mobiliser pour une citoyenneté créatrice de paix. Depuis, chacun des 50 participants, jeunes et adultes, a pris des initiatives là où il se trouve.
Les 29 images sur « les généralisations », « la suspicion », « les rumeurs, « les devoirs et les droits », « l’engagement » ont voyagé dans le pays : formation dans des centres éducatifs avec du « théâtre forum », interventions auprès des écoles et des groupes d’églises, échanges à l’occasion de la Journée de l’Enfant Africain et de la Journée mondiale du refus de la misère, dialogues avec des adultes, des jeunes et enfants qui vivent dans le site des déplacés de la mosquée centrale de Bangui, etc.. (lire l’article sur ce site : de la Centrafrique au Rwanda, des jeunes bâtisseurs de paix)
Formateurs de futurs enseignants
La responsable du Centre pédagogique Jean Paul II à Bangui, sœur Marie-Ange, était l’une des participants de cette formation qui a eu lieu à la Cour (maison d’ATD Quart Monde à Bangui). Elle a demandé à ATD Quart Monde de former des futurs enseignants à ce chemin de la paix, afin qu’ils puissent transmettre ce message plus tard à leurs élèves.
Sept membres d’ATD Quart Monde étaient prêts à relever le défi, ils se sont préparés afin de devenir formateurs pour les autres. Du 16 au 18 novembre 2015, ils sont partis avec les 29 images et surtout avec beaucoup d’envie de partager ce chemin qui lance à tous le défi de devenir des citoyens engagés. Sur un tableau sont accrochés les 29 dessins de scènes de la vie quotidienne qui soutiennent le dialogue avec les participants. Faire la lumière sur les préjugés qui détruisent est nécessaire pour comprendre les causes des conflits et aborder ensuite la résistance que chacun cherche à mettre en œuvre.
Des réactions très positives
« Le thème de la formation concorde à ce que nous subissons dans notre pays, la République de Centrafrique » a insisté un étudiant.
D’autres : « cet exposé me permet de mieux comprendre la paix. Il m’aide à ne pas avoir des préjugés sur les autres et il nous montre des comportements qui nuisent souvent aux personnes faibles dans la société. »
« Les animateurs ont bien expliqué les images et instauré l’idée de la paix dans notre tête. »
« En faisant la première image jusqu’à la dernière, je sais maintenant quel chemin prendre. C’est-à-dire le chemin de la paix. Et avant d’agir il faut d’abord douter, vérifier, choisir, décider et à la fin agir. »
« Auparavant j’avais la haine totale contre les sélékas et les bandits anti-balakas, mais suite à cet exposé je tiens maintenant à retourner vers la paix. »
Un formateur partage : « Dès le début je me suis dit qu’on était au ‘rendez-vous du donner et du recevoir’. Le but c’est d’amener les participants à aller au-delà. Sur une image, on avance en prenant en compte l’expérience des personnes. C’est important d’aider chacun à voir comment il va donner son témoignage dans son milieu, dans la culture qui est la sienne et dans son travail, etc… »
Une formation identique donnée aux jeunes de PIJCA
Durant la semaine, quatre autres membres d’ATD Quart Monde ont donné la même formation aux jeunes de la Plateforme Interconfessionnelle de la Jeunesse centrafricaine (PIJCA).
Le président de la PIJCA nous disait : « C’est le moment où jamais dans le pays, il faut que le message passe. Nous avons besoin d’approfondir ce message, c’est-à-dire de « préparer l’esprit des jeunes », afin qu’ils soient capables d’anticiper d’où vont venir les dérapages et comment garder le cap de l’engagement personnel de chacun ».
En tout, 35 jeunes de plusieurs régions du pays, des leaders de leurs communautés, de différentes religions (apostoliques, baptistes, musulmanes, catholiques) auront partagé leurs expériences de vie, démasqué les préjugés et les rumeurs à la source des conflits et se seront mis ensemble à Bangui pour marcher sur ce chemin de paix.
Les efforts se conjuguent : le geste que le Pape François a fait en visitant le pays dans un moment de conflit vient renforcer les efforts que la communauté et les jeunes font chaque jour pour bâtir la paix. Ces jeunes repartent ensuite dans leurs villages, leurs quartiers afin de transmettre ce chemin de paix à d’autres autour d’eux.
Le chemin de la paix continue en Centrafrique où les bâtisseurs sont nombreux !