Gestes de solidarité | Álvaro Iniesta Perez

Álvaro Iniesta Perez

Si nous voulons être capables de construire des sociétés justes, solidaires et en paix, nous devons nous unir en prenant en compte les forces, l’intelligence de tous et particulièrement de ceux qui vivent dans des situations de pauvreté en les considérant comme les principaux acteurs avec lesquels s’associer.

Trop souvent ignorés et invisibles pour le reste de la société, leurs gestes montrent mieux que tous nos discours que personne n’est pauvre au point de ne rien donner et nous confirment que les premiers à soutenir d’autres qui souffrent de la pauvreté sont ceux qui la vivent dans leur propre chair.

Voici quelques-uns des actes dont j’ai pu être témoin. Les prénoms sont modifiés mais les histoires sont réelles.

  • Grâce à Candida qui lui rend visite régulièrement et qui prend soin de lui, Manuel a pu être hospitalisé et traité en urgence, à la suite d’un arrêt cardiaque. Tous deux vivent dans des bidonvilles, dans une extrême précarité, à l’écart de la ville. Si Candida n’avait pas été là, Manuel n’aurait pas survécu.
  • Miguel a soutenu María et ses enfants pendant une période très dure pour elle où son mari était en prison et où elle a été expulsée de l’appartement dans lequel ils habitaient. Miguel l’a soutenue pour qu’elle trouve un logement et ne se retrouve pas à la rue.
  • Pendant plusieurs mois, Marisa a accueilli son fils dans l’appartement où elle a été relogée pour que lui et sa femme puissent accueillir dans de meilleures conditions leur nouveau-né. Ils vivaient en effet dans un camion garé dans une zone industrielle à la périphérie de la ville. En même temps, Marisa accueille et élève déjà trois de ses petits-fils, plusieurs de ses enfants se trouvant déjà dans une situation difficile.
  • Des femmes de groupes familiaux opposés surmontent leurs différends et se réunissent une fois par semaine pour fabriquer des savons ensemble. En plus de générer leurs propres ressources, elles démontrent qu’il est possible d’aller au-delà de leurs conflits et de générer une économie de paix dans un quartier touché par le trafic de drogues.
  • Ana María connaît ses voisins qui partagent son lieu d’hébergement, où se retrouvent de nombreuses personnes en situation d’abandon. Elle sait qu’ils ont beaucoup de choses importantes à apporter. C’est pourquoi, chaque fois qu’approchent des rencontres et réunions du Mouvement ATD Quart Monde, elle apporte plusieurs lettres de préparation et elle les interroge, note leurs réponses et les remet à l’équipe pour que leur savoir soit pris en compte.
  • Alfredo sait que Ramón a eu un conflit qui l’empêche de participer à une association. Au lieu de l’ignorer, Alfredo s’implique et motive d’autres responsables de cette association pour qu’ils discutent avec Ramón, qu’ils comprennent la racine du problème, et trouvent ensemble une solution.
  • Concepción a sorti sa petite sœur de la décharge municipale où elle vivait. En l’accueillant et en lui offrant un endroit décent où vivre, elle l’aide à sortir de la drogue.
  • Antonio est un retraité qui vient de sortir de prison. Il avait cessé de percevoir une pension qu’il recevait à la « Banque des prisons ». José l’accompagne à différents rendez-vous auprès des services sociaux pour qu’il puisse régler sa situation administrative et qu’il ait à nouveau accès à sa pension.
  • Ernesto accueille Eva chez lui après que celle-ci s’est retrouvée à la rue suite à une dispute avec sa famille. Ernesto a vécu un temps dans la rue et, conscient des dangers, se serre un peu dans sa nouvelle maison pour prendre en charge Eva, comme s’il était son propre père.

Il n’est pas habituel qu’on prenne en compte les personnes en situation de pauvreté pour chercher des solutions à ce qu’ils vivent, ou qu’on les écoute dans les grands événements sur la solidarité. C’est un véritable gâchis car dans leur quotidien ces personnes posent dans leur vie des actes concrets et réalisent des gestes de reconnaissance et de soutien envers ceux qui se trouvent aussi dans des situations très difficiles. Cela donne tout son sens au mot espoir et montre qu’une vie digne est possible pour tous.

 

Photos : © ATD Quart Monde