Intervention de Marie-Thérèse Leprince Membre du Mouvement ATD Quart Monde France
Les violences institutionnelles et politiques. Colloque international « La misère est violence, rompre le silence, chercher la paix » Maison de l’UNESCO 26 Janvier 2012
Je vais vous donner quelques exemples de violences.
Dans plusieurs pays, les familles ont vécu la violence du déguerpissement. On les chasse pour donner une belle image de la ville. Ceci a été vécu au Sénégal, à Madagascar.
En France, dans ma région, un après-midi, des commerçants s’étaient organisés pour obliger, par la force, à faire monter dans leurs voitures une dizaine de personnes survivant dans la rue, pour les laisser en pleine campagne à 30 km de la ville. Cela a pu être dénoncé dans les journaux mais personne n’a été puni.
Ce sont des violences de choix politique pour les déguerpissements, des violences presque innommables pour ce qui s’est passé dans ma ville puisque personne n’a été jugé pour cette violence.
En Angleterre, on a retiré les enfants à une famille. On lui interdit de pleurer devant eux et de leur dire combien ils lui manquent. Ceci, lui dit-on, pour éviter de perturber davantage les enfants. La famille n’a le droit que d’envoyer une photo et une seule lettre par an. Cette lettre sera lue par le service social qui jugera si elle sera remise ou non aux enfants. C’est une violence institutionnelle : le placement est une décision de la justice.
Dans une commune, un homme qui ne pouvait, par manque d’argent, assurer les frais d’enterrement de sa femme, s’est vu obligé par le maire de creuser la tombe de son épouse. Le maire a dit qu’il trouvait cela normal car c’était une manière de le responsabiliser et d’éviter que ces frais ne soient imputés à la commune. C’est une violence institutionnelle et politique.
En France, étant sous mesure d’expulsion, une famille a été contrainte d’accepter une tutelle. C’était cela ou on lui retirait ses enfants et elle se retrouvait à la rue. Première violence : aucune possibilité de discuter, de choix de réflexion commune possible, c’est une imposition. Depuis la mise sous tutelle, la dette de loyer se trouve épurée doucement, ce qui correspond à la logique de la mise sous tutelle, sans se préoccuper du reste à vivre pour la famille. Et là, il il s’agit d’une violence liée à la mise sous tutelle qui n’envisage pas la « globalité » de la situation familiale. On règle les dettes sans se préoccuper de ce qu’il reste pour vivre.
Nous disons que tout ça, ce sont des violences insitutionnelles et il faut savoir également que parfois des familles très pauvres subissent plusieurs violences en même temps.