Les femmes, dernier rempart contre la misère
Pour terminer cette semaine de célébration de la Journée Internationale des Droits des Femmes, nous partageons un article de Joseph Wresinski, fondateur d’ATD Quart Monde, qui rend hommage à la résistance et à l’inventivité des femmes face à la misère.
Ce texte est un extrait de « Écrits et Paroles », Tome 1, de l’ouvrage Aux volontaires, 1960-1967, publié aux éditions Saint-Paul Éditions Quart Monde, 1992, pp. 86-87.
Dans cet extrait, Joseph Wresinski, lors d’une rencontre de formation en 1962, invite les volontaires engagées au camp de Noisy-le-Grand à découvrir la résistance des mères de famille face à la misère accablante. Il explique pourquoi l’action développée avec les familles du camp est d’abord destinée à soutenir ces femmes dans leur combat quotidien.
Le pivot qui demeure
Mais pourquoi avons-nous commencé notre action par les femmes ? Je crois que la femme est le pivot qui demeure, quand la famille est enfoncée dans la misère. Devant une pareille misère, seule la femme peut tenir debout.
L’homme s’écroule, il abandonne, mais la femme tient debout, elle sauvera toujours le foyer. Toute ma vie, j’ai vu cela. Peut-être ne pensez-vous pas comme moi, mais c’est mon expérience.
Les femmes ont une espèce d’énergie intérieure qui demeure, quoi qu’il arrive. Il n’y a pas une mère de famille ici qui n’ait pas subi des coups durs incroyables. Pour chacune, on pourrait en faire un livre. Je vous fais remarquer qu’elles ont pourtant une tenue extraordinaire. Elles ont de la fierté et, pour qui a le regard assez fin, de la distinction. Regardez Madame H.
Son mari n’a plus de travail depuis longtemps et c’est elle qui s’en va tous les matins à 5 heures, travailler à l’usine. Elle rentre le soir à 7 heures. Tout cela parce qu’elle a un fils. Elle supporte tout, parce qu’elle a un enfant.
Proclamer la dignité des femmes
Remarquez que les femmes ne sont pas la solution à la misère, elles n’ont pas les remèdes entre les mains. Elles sont le dernier rempart contre la misère, c’est tout autre chose. Elles sont le pivot de la résistance à la misère. Si elles prennent le dessus, le foyer peut tenir. Elles ne peuvent pas changer les hommes, mais le foyer changera, le foyer respirera. Cela n’est pas une solution à la misère, mais c’est une réponse à l’appel des familles à vivre dans la dignité. Aussi, notre action est-elle une manière de reconnaître et de proclamer leur dignité.
Photo : Anouk Grimberg, « Joseph L’insoumis », Film De Caroline Glorion, Les Films De La Croisade Et Iota Productions, 2010.