Plaidoyer pour une meilleure aide humanitaire
Par Diana Skelton
L’ONU prépare actuellement un Sommet Humanitaire Mondial (WHS) – prévu à Istanbul en mai 2016 – qui vise à améliorer l’efficacité de l’aide apportée tant aux victimes de conflits armés qu’aux victimes de catastrophes naturelles. Du fait de la croissance continue de la population mondiale, les zones touchées par les catastrophes naturelles sont plus peuplées que par le passé. Et du fait des changements climatiques, les catastrophes naturelles ont vu leur nombre augmenter. Aussi, jamais depuis la Seconde Guerre mondiale n’a-t-on connu autant de personnes déplacées pour raison d’urgences. Au cours de la seule dernière décennie, le nombre de personnes touchées par des crises humanitaires a doublé. Et ce sont aujourd’hui près de 60 millions de personnes dans le monde qui ont besoin d’aide humanitaire.
Cette augmentation exponentielle du besoin humanitaire accroît le risque qu’un nombre plus important de personnes passent entre les mailles du filet des efforts d’aide, en étant soit totalement exclues des dispositifs, soit lésées par des efforts d’aide non adaptés à leurs situations. Afin de s’assurer que l’aide déployée atteigne au mieux les personnes qui en ont le plus besoin, ATD Quart Monde propose deux recommandations, basées sur son expérience en Haïti et en République centrafricaine:
Les membres de la communauté locale – pas seulement les dirigeants – devraient pouvoir prendre part aux décisions qui les impactent. Leur participation devrait être effective aussi souvent que possible, et a minima une large consultation serait à prévoir dans les cas où un manque de temps rend une participation de tous impossible. Il est important d’aller à la rencontre des plus vulnérables d’une communauté : leur point de vue et leur expérience peuvent être bien différents de ceux des personnes les plus dynamiques de cette même communauté.
Pour renforcer la sécurité de tous, la distribution de l’aide devrait être réalisée de façon à accroître la solidarité de la communauté sans opposer les gens les uns aux autres. Les interactions des travailleurs humanitaires avec les communautés locales devraient également contribuer à renforcer ces relations de solidarité qui augmentent la sécurité.
En amont du WHS, chacun est invité à exprimer son point de vue via le site internet que l’ONU a établi aux fins de consultation en ligne. La participation du public est ainsi activement recherchée, notamment parce que « ce sommet se concentre principalement sur les personnes qui sont exclues des processus de développement. Nous sommes tous conscients que les crises humanitaires peuvent nuire voire inverser la dynamique de progrès et de développement, parfois même en le faisant régresser de plusieurs décennies ». Le site gère plusieurs forums de discussion et lance un appel à idées, recherches et recommandations, qui peuvent être soumises d’ici le 31 Juillet 2015 afin d’être intégrées aux préparatifs du sommet. Les organisateurs peuvent également être contactés sur Twitter : @WHSummit, ou via le hashtag #ReShapeAid.
Outre les gouvernements, des associations telles que Médecins sans Frontières, et de grandes entreprises comme Accenture participeront également au sommet. Le site internet du WHS gère notamment un forum de discussion spécifiquement dédié aux entreprises, qui elles aussi, sont impactées par les crises qui touchent leurs collaborateurs et leurs clients. Elles peuvent également s’engager en soutenant les actions humanitaires. Néanmoins, à moins que leurs initiatives n’incluent la consultation des gens du terrain, elles risquent d’offrir un soutien inadapté. Par exemple, aucune disposition n’avait été prévue concernant les bouteilles en plastique envoyées en Haïti suite au tremblement de terre pour pourvoir au besoin en eau potable. En quelques semaines, la ville de Port-au-Prince s’était retrouvée jonchée de bouteilles usagées, sans aucun moyen de les recycler.
Étant donné que le WHS s’appuie sur la connaissance, l’expérience et l’innovation des personnes ayant traversé des conflits et des catastrophes naturelles, nous espérons sincèrement que leurs consultations prévoiront également d’inclure les personnes qui vivent dans la pauvreté. L’intelligence de ces personnes est une ressource cachée à laquelle nous devrions faire appel pour définir et trouver ensemble de meilleures approches.