Revue Quart Monde N°246 | Ni potence, ni pitié !
Trimestriel – n° 246 – 8 € – 10 FS – 11 $CAN
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Introduction
Par Martine Hosselet-Herbignat
Il y a plus de trente ans, l’historien Bronislaw Geremek publiait « La potence ou la pitié »1. Il expliquait comment la pauvreté n’avait jamais cessé d’inspirer des sentiments contradictoires. De la part des individus, compassion et répulsion. De la part des autorités et des pouvoirs publics, institutions de secours et institutions de répression. Ce livre est devenu une référence.
Pour le philosophe Paul Dumouchel, la question est :
Pourquoi si nombreux sont ceux qui approuvent les politiques répressives à l’égard de la pauvreté, et qui trouvent le principe de l’aide punitive à la fois rationnel et évident ?
Michael Lambert, historien, déconstruit l’État-providence en Grande-Bretagne, qui peine à sortir des dilemmes engendrés par la « gérance » de la pauvreté et qui ignore superbement la parole des personnes affectées par les politiques sociales et leurs implications. Axelle Brodiez-Dolino observe les façons dont ce régime binaire « pitié-potence » a pu, au cours du siècle dernier, être contourné ou surmonté, et qui sont porteuses de pistes pour l’avenir. Comme juriste, Jacques Fierens constate lui aussi l’échec fréquent, pour le droit, à traduire une autre réponse que la répression ou la pitié, tant la crainte subsiste toujours de voir les acquis démantelés par le néo-libéralisme, et le principe d’équité battu en brèche.
« Ce qu’affirme une très longue tradition, à laquelle le père Joseph Wresinski appartient, est que la seule manière d’échapper à la potence ou à la pitié est l’‘agapè’, qui peut prendre la forme d’une pauvreté cette fois consentie, en solidarité avec ceux qui subissent la misère. » conclut-il.
À Gardanne (France), un maire et un collectif de citoyens choisissent résolument l’accueil et le logement de familles Rroms ; ils engagent d’importants moyens humains dans ce processus qui vise une coopération intelligente entre pouvoir politique et société civile. Depuis les années 60, le centre d’accueil Frimhurst, en Grande-Bretagne, révolutionne la manière d’accompagner les familles les plus en difficultés. Les membres de la Ferme Berthe Rousseau à Montréal, les parents et leurs enfants qui choisissent, à Paris, de vivre une colocation solidaire avec des personnes précédemment sans domicile fixe, expérimentent que « Le développement durable, c’est aussi le développement des personnes et du cœur, c’est le développement de la vie au sens large ».
Représentations revisitées, qui font socles pour une réelle démocratie locale, nationale et internationale, comme le préconisait déjà il y a vingt ans le Rapport Wresinski.
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