Séminaire Extrême pauvreté et exclusion en Afrique
Photo : Réception à l’Hôtel de Ville de Paris, mai 1981 © Mira Marik / ATD Quart Monde / Centre Joseph Wresinski / 0006-023-004-(33)
Article écrit par Loïc Besnard, archiviste du Centre de mémoire et de recherche Joseph Wresinski.
À l’occasion de la Semaine Internationale des Archives 2021 (7-11 juin), le Centre Joseph Wresinski vous invite à découvrir l’histoire du séminaire Extrême pauvreté et exclusion en Afrique. L’anniversaire des 40 ans du séminaire coïncide avec celui de la première implantation d’ATD Quart Monde en Afrique.
Du 20 au 22 mai 1981, le séminaire Extrême pauvreté et exclusion en Afrique a rassemblé une soixantaine de personnes venues de 14 pays d’Afrique1 et d’autres continents dans les locaux parisiens de l’Institut International de Planification de l’Éducation (IIPE) à l’Unesco.
Organisé par le Forum Permanent sur l’extrême pauvreté, réseau d’ATD Quart Monde qui bâtit des relations avec ceux qui s’engagent auprès des populations défavorisées, ce séminaire avait pour but de faire entendre la parole des plus pauvres face aux représentants des organisations internationales représentées par la Banque mondiale, le BIT, l’OMS, l’ONU, le PNUD, l’Unesco et l’Unicef.
Discours de Joseph Wresinski
Dans son discours d’accueil du 19 mai 1981 à Pierrelaye, Joseph Wresinski appelle les personnes les plus défavorisées issues des peuples africains à partager leurs connaissances et expériences pour lutter contre l’exclusion aussi bien en Afrique qu’en Europe :
« Dites-nous ce que vous pensez, réfléchissez avec nous, conseillez-nous, veillez sur nous, devenez nos amis pour de bon. (…) Qui mieux que vous peut savoir ce que signifie de voir ignorer son histoire, son identité, ses richesses inaliénables d’homme et de peuple ? Qui mieux que vous peut comprendre pourquoi les plus pauvres, les exclus dans le monde entier ont besoin qu’on reconstitue leur histoire avec eux, qu’on les écoute, non pas parce qu’on veut les éduquer mais parce qu’on a besoin d’être éduqué par eux ? Qui mieux que les hommes et les femmes d’Afrique que vous êtes peuvent devenir les défenseurs de toutes les populations exclues, en tous continents ? Qui pourrait parler avec plus d’autorité, avec plus d’expérience ? »
Discours de Joseph Wresinski, 19 mai 1981 © ATD Quart Monde / Centre Joseph Wresinski / 1030/01/02
Audio : extrait du discours du 19 mai 1981 © ATD Quart Monde / Centre Joseph Wresinski / 2AV3022 (47’53-52’14)
Discours d’Amadou Hampâté Bâ
Le séminaire s’est déroulé sous le patronage d’Amadou Hampâté Bâ, penseur malien, écrivain et ancien membre du Conseil d’administration de l’Unesco. Pour lui, les aides internationales apportées aux plus démunis sont inefficaces lorsqu’elles se basent sur un apport uniquement matériel sans associer à la lutte contre la grande pauvreté les personnes qui la connaissent le mieux :
« Il se révèle indispensable et urgent de reconsidérer certaines formes d’aide, leur modalité et leur finalité. Il importe d’élaborer de nouvelles techniques d’action afin d’éviter que des dépenses coûteuses ne se soldent par un résultat presque négatif. La longue expérience pratique d’ATD Quart Monde lui a permis de constater qu’en matière d’aide le bon résultat ne s’obtient pas en imposant du dehors des formes d’aides sans consulter les principaux intéressés, c’est-à-dire les assistés eux-mêmes. Mon maître Tierno Bokar, le sage de Bandiagara, disait : “Il faut d’abord écouter celui que l’on veut aider pour l’aider à bon escient, car une aide sans discernement est pareille à une flèche qui manque son objectif et se perd dans la nature”. »
Discours introductif du 20 mai 1981 à l’Unesco © Amadou Hampâté Bâ / Centre Joseph Wresinski / 1030_01_02
Audio : Extrait du discours du 20 mai 1981 à l’Unesco © Amadou Hampâté Bâ / Centre Joseph Wresinski /1AVP552
Résolutions et conclusions du séminaire
Les participants du séminaire ont demandé la reconnaissance par les communautés internationales de l’expertise des personnes engagées sur le terrain ainsi que du statut prioritaire des personnes en situation de handicap les plus défavorisées.
Ils ont également demandé la création d’une antenne permanente de rencontre et d’échange à Dakar. Créée en 1982, celle-ci a fonctionné en lien avec Élisa et Philippe Hamel et l’équipe du Forum Permanent.
Son rôle était de soutenir ceux qui s’engagent aux côtés des plus défavorisés, connaître les initiatives africaines pour lutter contre la misère et développer la solidarité, influencer les projets, les programmes de développement et initier des actions de solidarité.