Transformer sa communauté

En 2017, ATD Quart Monde a invité à écrire des histoires vraies de changement contre une situation d’injustice et d’exclusion pour montrer que lorsqu’on s’unit pour un même combat la misère peut reculer.
Les articles sur notre site ne sont pas signés car il s´agit de favoriser une voix collective. Dans le cadre des 1001 histoires, l’auteur met en lumière une histoire vécue. L’histoire qui suit a été écrite par Maria Kresge (USA).

Au centre social où je travaillais, une jeune femme surnommée Toni vint nous demander de l’argent pour nourrir ses enfants. Nous ne pouvions pas répondre à sa demande, mais nous l’avions accueillie, fait visiter le centre, décrit l’espace informatique, les cours de danse et de piano, et lui avions parlé de l’« open mic », une scène libre, et du repas participatif mensuel. Elle avait été très enthousiasmée par l’espace informatique et avait demandé si elle pourrait lire un poème ou un court texte au prochain « open mic ». Bien sûr !

Dès lors, elle vint tous les jours avec son ordinateur pour écrire, encore et encore. Plusieurs travailleurs du centre social se plaignirent que son fils de sept ans passait sa journée à regarder la télévision. Et que Toni était toute la journée dans l’espace informatique, alors que les autres usagers ne venaient qu’occasionnellement. En tant que directrice du centre, on me poussait à contrôler combien d’heures gratuites d’internet utilisait Toni, et combien de temps son fils passait devant la télévision. Parfois, elle le laissait avec nous et rentrait chez elle pour s’occuper de son compagnon âgé qui ne pouvait pas travailler. On me demandait aussi d’attirer plus de gens vers l’espace informatique.

Pourtant, il était évident que Toni cherchait du travail, elle qui avait été chauffeuse de bus, puisqu’elle avait demandé de l’aide pour son CV et ses lettres de motivation.

  • Un jour, elle nous expliqua que venir au centre lui offrait un espace pour réfléchir. Elle ajouta qu’elle disait à ses enfants : « Maman va travailler au centre ». Elle venait tous les jours, restait jusqu’à la fermeture, se mêlait aux résidents et aux gens du quartier présents, et travaillait sur son ordinateur.

Quand elle vint partager son histoire à l’«open mic », tout le monde fut ému. Elle lut aussi trois poèmes. Elle annonça à toutes les personnes présentes qu’elle espérait voir publié prochainement son premier recueil de poésie. Nous eûmes alors la confirmation qu’elle travaillait, et sans toucher de salaire.

  • Les mois ont passé, Toni a continué de venir au centre social et nous a demandé de relire son livre. Durant l’« open mic » suivant, elle chanta son poème en blues. Quelle voix ! Dans l’assistance, son fils, sa fille et une amie étaient venus voir le « travail de maman ».

Et ce ne fut pas tout. Pour quelqu’un qui vivait dans la pauvreté et affrontait les difficultés de concilier une vie de famille avec la détermination de continuer à travailler, Toni avait un don insoupçonné pour créer des liens, qui se révéla dans sa proposition de faire chaque semaine un « open mic ».

Toni veilla à tous les préparatifs. Elle apporta les nappes, les bougies et les rideaux pour transformer la grande salle en club de jazz. Son initiative fut très bien accueillie. Comme elle était tout le temps au centre et s’était liée avec les musiciens, les poètes et les artistes qui le fréquentaient, elle avait compris que les membres de la communauté avaient besoin d’un club pour partager leur art. De la même manière que nous avions cru qu’une communauté pauvre avait besoin d’une scène libre où inviter des artistes d’autres horizons, elle voulait aller plus loin et réunir chaque semaine les artistes locaux.

La nuit de l’ouverture, le conseil d’administration constata les résultats que l’on obtient en accordant aux projets le temps de se développer, alors qu’avant le personnel semblait croire que les ressources du centre n’étaient pas employées à bon escient. Que s’était-il passé ?

  • Le centre avait, sans le savoir, donné naissance à une personne capable de transformer sa communauté. Ce fut un nouveau départ pour le centre social et pour Toni, qui se vit offrir la possibilité de développer encore davantage son projet et d’être rémunérée.

Elle vit aussi avec fierté son livre publié en ligne : « From Me to You » (de toi à moi).

Pour connaître d’autres 1001 histoires de changement, visitez le blog.

  1. Nous devons mener ensemble le combat de lutter contre la misère dans la vie du jour au jour, en plus vous pouvez m’envoyer les nouvelles du travail du mouvement pour être assez outiller de réalités de la lutter contre la misère.

  2. Bonjour,
    Je suis nouvellement alliée du mouvement, après 3 ans dans le volontariat à Montréal.
    Je suis très touchée par l’histoire de Toni. Étant moi-même passionnée de littérature, j’aimerais beaucoup lire le livre en ligne From me to you. Comment pourrais-je y avoir accès?
    Merci d’avance!
    Caroline

    1. Salut Caroline!
      Nous te conseillons de demander à l’équipe des USA pour le livre « From me to you ». Leur adresse mail est sur ce site, dans la page États-Unis.

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